Tranche de vie (carpe)…

Pour les amoureux de grand air et d'espaces naturels...

Tranche de vie (carpe)…

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Tout commence à quatre ans, avec mon père et mon grand-père, nous sommes à Wasnes-au-Bac (59) sur une barque à la pêche…

Sur l’eau, nous naviguons sur une petite pièce d’eau…  À travers la surface, juste derrière mon reflet, je vois quelque chose, je vois des herbes, je vois un poisson !

Mon père et son père à Wasnes-au-Bac (années 30')

Mon père et son père à Wasnes-au-Bac (années 30′)

 

Potamogeton

Potamogeton sp.

      Voilà comment tout a commencé, tout le reste de ma vie restera reliée à l’élément vital. Tout d’abords cela s’est traduit par le besoin irrépressible d’avoir ma “pièce d’eau” à la maison, quitte à ce que la salle de bain familiale devienne cette pièce !

Benoit Jonas à la pêche

Première pêche àSaint Céré (1968).

Sous forme d’aquariums sauvages, insectes, mollusques, batraciens, invertébrés divers, il y avait de tout dans ma “ménagerie de verre”…

Cottus gobio (Chabot de rivière)

Cottus gobio (Chabot de rivière)

Parallèlement, vers 7 ans, durant les vacances,  mon père me fait une petite gardonette avec une branche, le petit ruisseau d’à côté devient mon lieu de prédilection. D’autant plus que du pont j’ai aperçu une truite qui mouche ! Ni une ni deux, je vais passer le plus clair de mon temps à croire que je vais l’attraper, et je n’attrape que des vairons avec mes bouts de vers de terre et “portefaix“… J’aperçois parfois un Chabot de rivière (Cottus gobio), sortant de sous la rive, à mes pieds, mais  mes essais sont vains et il garde sa liberté…

La période des vacances était la plus propice aux sorties, vivant proche de mares et petits étangs ma pêche s’est naturellement vouée aux eaux stagnantes, aux miroirs calmes. A l’époque un gros poisson, c’était un carassin, une tanche, voir un carpeau… Petit  à petit la pêche s’est affinée, j’ai pêché  à la pelote et bouquet d’asticots, ou bien au double bas-de-ligne esché de cubes de pomme de terre sur trident, ou au pois chiches (premiers cartons de carpes). Généralement, je relâchait la/les plus grosses et la/les plus petites, pour ne garder qu’une ou parfois deux moyennes, pour les manger…

J’étais devenu maître dans l’art d’accommoder la carpe et j’ai fait aimer le poisson d’eau douce à de nombreuses personnes…

carpe

C’est en pêchant à l’étang de Saint Quentin (Trappes 78), au début des années 80′ (au siècle dernier ^^ ) que j’ai découvert, d’abord la pêche à l’anglaise avec waggler, mais surtout la pêche au swing-tip et quiver-tip. Ces techniques étaient peu utilisées en France, et un pote de pêche pêchant régulièrement aux Pays-bas nous rapporta tout cela, et fut notre maitre dans cet apprentissage. Je ne compte plus les parties de pêche dans les gravières de Guernes/Sandrancourt (gravières de Seine), où nous faisions des cartons de Brèmes de 1 à 2 voir 3 kilos et quelques carpes faisaient crisser les moulinets plusieurs fois par jour !
Des parties plus modestes dans un étang de Sologne, ou nous pouvions compter sur des carpeaux variant de 200 grammes à 2 kilos.

      Mais le lieu de tous les jours était l’étang de Saint Quentin en Yvelines, une belle partie des rives offraient de bons coups pour pratiquer la pêche au Quiver-tip (sans feeder à l’époque). Gros Gardons des belles Brèmes étaient au rendez-vous, et les journées s’écoulaient, au rythme des scions qui pliaient sous les tirées…
Le point d’orgue de cette époque fut la participation aux premières 24 heures de pêche de l’étang de Saint Quentin en Yvelines (6 et 7 juin 1987), passer 24 heures les yeux rivés sur le quiver n’était pas une mince affaire (si je puis dire), mon coéquipier (trouvé un peu par hasard, et que je connaissait à peine plus que “de vue”), me fit rapidement faut-bon en partant picoler à droite à gauche, il ne pêcha qu’une petite heure et ne prit aucun relais… J’arrivais tant bien que mal à me maintenir à la 3ième place durant les premières pesées, mais la fatigue me rattrapant, je me retrouvais dans les 10 premiers tout de même.

      En 1986 le premier article paru sur la bouillette dans “La pêche et les Poissons”, et attira mon attention, à cette époque je mangeais encore quelques petites carpes que je capturais aux pois-chiches ou aux petits pois…
Mais je compris immédiatement que la technique décrite pouvait devenir la mort de l’espèce dans nos plans d’eau, si nous n’y prenions pas garde, et je commençais à pêcher en “no-kill” !

Carpe de 8 kg

Carpe de 8 kg baptisée “Florentine”, car elle se piquait systématiquement sur les bouillettes parfumées à la “Florentine”

La recette de mes premières bouillettes (bille de 10 mm roulées une par une à la main et bouillies) était simple, de la farine de blé, des œufs, du chènevis carpe-bbmoulu, un montage au cheveux, et je capturais une ~7 kg le jour même, une révélation (à méditer sur la surenchères de produits, et autres “boosters”) !
Un lac de 3 ha (retenue des eaux pluviales de la ville) allait devenir mon “antre” pour de nombreuses années, connaissance des fonds, des lieux de prédilections des carpes en fonction des saisons et des moments de l’année m’aida grandement aux cours de ces années. Des carpes vigilantes, très pêchées, tatillonnes, m’obligèrent à expérimenter toutes sortes de mixs, de bouillettes, de montages etc. Je devins expert en montages subtils; les bouillettes équilibrées, flottantes n’avaient plus de secrets pour moi…

Pendant quelques années j’en étais le garde pêche, puis président de son AAPPMA, et c’est à cette époque qu’un empoissonnement a été fait avec des carpes de tailles moyennes (surtout des communes). Dernièrement j’ai appris qu’elles se faisaient capturer à des poids dépassant les 20 kg ! Cela me ravie.

Didier Cottin et Georges Cortay

Didier Cottin et Georges Cortay (courtoisie de Didier Cottin).

Durant cette période, des articles parurent dans les magazines de pêche, sur des pêches miraculeuses à St Cassien !!!
Didier Cottin et ses amis, les frères Van den Hooven, Rod Hutchinson, Kevin Maddocks et tant d’autres, devinrent des “mentors” pour des générations de carpistes…

 

 

 

Léon et "half-moon"

Léon et “half-moon”, le jour où nous avons fait connaissance, avec Didier Moine évidemment. (courtoisie Léon Hoogendijk)

Didier Moine

Le regretté Didier Moine. (courtoisie Léon Hoogendijk).

 

 

 

 

 

Dois-je rendre aussi hommage à Claude Silano & Christian Abgrall, les frères Mahin, Dominique Audigué, Philippe Laggabe, Frank Hiribarne, dont je fis la connaissance lors de mon troisième séjour à Cassien en 1993 (encore un “enfant” ^^ ), Léon Hoogendijk et Didier Moine,  Jean Louis Bunel qui nous permit d’acquérir les nouveaux matériels “hi-tech” que sont les détecteurs sonores (Optonic, Bi-tech viper…etc.), dans son magasin du boulevard Arago ?
Ils sont des exemples; nous marchons tous sur leurs traces.

 

Sans oublier les virées au magasin “Watersport Central” à Genk !!!

 

Bi-tech "viper"

Bi-tech “viper”

 

 

Carpe de 21.4 kg

Carpe de 21.4 kg St Cassien

       Juin 1992 le rêve St Cassien devint un jour réalité, avec un ami nous y avons plantés nos rod-pods et bivvys et fait un petit carton dès notre arrivée, là je capturais ma première carpe de plus de 20 kg !!! L’extase !
Sessions après sessions, le besoin de découvrir de nouveaux espaces devint le leitmotiv, ouvrir les fenêtres du rêve, élargir l’espace des possibles. Donc St Cassien avec son havre “Les Bois de Caillan”, devint une destination régulière, puis Cabanac, puis Orient, Sainte Croix, la Seine. . . Une belle tranche de vie


D’autres lieux hors champs, hors sentiers battus, qui apportaient une satisfaction monstre de par l’absence totale d’autres pêcheurs, lieux vierges de toute pression. LE but n’étant toujours pas la “plus grosse”, il fallait juste que la ressource soit totale… Le corps et l’esprit liés à l’eau et à la terre, le ciel et ses nuits étoilées, sa voie lactée, la comète de Halbop, une hulotte qui hulule, un renard qui glapit, un grèbe qui râle, ou un héron qui se pose au milieu des cannes… La panique ! 🙂

St Cassien

St Cassien dans le brouillard

 

Ainsi les années s’écoulèrent, je touche du bois, jamais sur un grand lac je n’ai connu le capot… Je parle sur une session complète bien-sûr. La plus colossale que j’ai pu faire dura 3 semaines sur St Cassien, pour 2 poissons, la neige était tombée sur les hauteurs entourant le lac, gros refroidissement, donc bouches closes sur tout le lac, plus personne ne faisait rien…

 

Carpe à Cabanac

Torpille de Cabanac

      Par la suite j’eus l’occasion de me frotter à ce grand barrage tout en méandres qu’est Cabanac (Castelnau-Lassout), et ai piqué ses belles communes, toutes en camaïeux de “bronze et d’or”, aux bouches dures d’avoir vermillé entre ses rocs, à la recherche d’invertébrés riches en carotènes, voir de bivalves filtreurs !
Y avoir fait une session en février, et avoir été “piqué” par le froid de ces hauteurs, thermomètre descendant à -15°, ça il faut l’avoir senti, pour apprécier pleinement la carpe qui vous réveille au lever du jour… Pour apprécier pleinement cette pêche ! 8)

       Le tableau serait incomplet si j’oubliais “Orient”, cette “mare” de 23 km2 qui m’a offert ma plus belle carpe ! La première rencontre avec le lac fut épique, avec un pote nous décidions d’y aller sans réelle préparation, sans bateau digne de ce nom (juste un petit pneumatique pour enfant). Nous jetons notre dévolu sur la presqu’île de la petite Italie, nous partons à pied pour repérer un poste possible pour deux… Une petite baie fera l’affaire !
Carpe de 24.6 kg Forêt d'OrientL’aventure commence, il nous faut apporter tout notre barda à pied, au bas mot, 2,5 km… De 100 mètres en 100 mètres, nous transportons tout, et les aller-retours s’enchaînent, nous devenons des zombies, des “ânes de bat”, le mode automatique se met en marche, et nous portons, portons, portons… À la orient-a.1tombée du jour il faut nous rendre à l’évidence, nous n’avons fait que les 2/3 du chemin, et nous n’en pouvons plus… Il fait beau, nous installons notre campement là au milieu de nulle part ! Nous sommes en mai, les grenouilles sont à l’apogée de leur excitation annuelle, et le concert de coassements est assourdissant ! Par vagues, les chants s’élèvent, ou  s’estompent, reviennent, repartent ! S’il n’y avait que ça, mais non, les moustiques sont de la partie, par millions ! Moi je peux dormir complètement emmitouflé dans mon duvet, mais mon pote n’arrive pas à dormir comme cela… Au matin, le pauvre, à le visage bouffi de piqûres, un moment dans la nuit, mes pieds sortent à l’air libre, et les boutons resterons plusieurs semaines visibles, 300 marques par pied pour donner une idée du cauchemar ! Frissons et fièvre vont nous suivre durant le séjour. Le jour se lève sur le lac, nous finissons notre approche, nous nous installons tant bien que mal… La petite baie fait 20 m x 20 m d’ouverture, notre espace est restreint, amorçage à la graine et quelques bouillettes, et nous voilà paré… Heureusement que nous n’avons fait que des brèmes, je n’imagine même pas ce que cela aurait donné si une locomotive avait accroché un de nos hameçon… De toute façon, en cour de session, nous apprenons par des pêcheurs de carnassiers qui passent par là, qu’elles frayent de l’autre côté de la presqu’île ! Nous avons pliés, dépités, moulus, une expérience inoubliable, avec comme seule réflexion finale qu’on ne nous y prendrait plus…
Par la suite, Orient m’a apporté de grands moments, et j’y retournerai.

Lac de Cabanac

Lac de Cabanac en hiver.

 

Articles en Russe.

Articles carpe, en Russe.

      C’est à cette époque qu’un magazine de pêche Russe m’a contacté (par l’intermédiaire de ma belle-sœur), afin d’écrire quelques articles, pour faire découvrir la pêche en “no-kill” de la carpe telle que la pratiquions. J’ai donc transmis mes manuscrits à ma chère belle-sœur qui les a traduits en russe pour la revue “Ribalof”, faisant ainsi découvrir d’autres horizons aux pêcheurs de l’époque post-soviétique, une autre tranche vie

 

 

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      Un incident (qui aurait pu tourner au drame) à mis fin à cette époque de ma vie… Au retour d’une session à St Cassien, un mistral à décorner les boeufs soufflait comme rarement… Au passage du pont de la Durance, non loin d’Avignon, une rafale encore plus violente a réussie à arracher la sangle de tête, fixant le “Porta-bote” aux barres de toit… J’ai pu apercevoir le bateau décrire une parabole vertigineuse, à plusieurs mètres de haut, et venir s’écraser et exploser au milieu de l’autoroute !!!
Heureusement qu’aucune voiture n’était à proximité, et que tout cela n’a fini que par du plastique en morceau… Bref la vie est ainsi faite, mon désappointement vira au traumatisme, et j’arrêtais de pêcher, n’ayant plus d’autre vision de ma pêche, sans bateau, j’arrêtais pendant 12 ans… !

. . .

      Pêcher la carpe, c’est aussi s’exposer aux intempéries, qui n’a jamais eu à affronter un orage ?
Celui qui reste le plus gravé dans ma mémoire, est celui que j’ai vécu, une nuit, à St Cassien, seul ! La peur chevillée au ventre durant la quasi totalité de la nuit !
Cela démarre vers 22 h30, des grondements, lointains d’abords, puis se rapprochant de plus en plus, troublent la quiétude de la soirée, puis c’est au tour du vent de se mettre à souffler violemment… Je suis face Au Y sur la côte ouest… Puis viennent les éclairs, et trombes d’eau, et cela tape dans tous les sens, je suis en contre bas, le long de l’eau, recroquevillé sur mon bed-chair, je ne touche à rien, il fait nuit noire… Pas eu le temps de relever les cannes… Tous les petits chênes en contre haut de mon bivouac, mangent de l’électricité, à chaque impact, la centrale Delkim s’emballe ! Des centaines d’impacts, à quelques mètres de moi, je n’en mène pas large… Ouf il s’en vas… Aïe il revient, et ainsi de suite jusqu’à 03 h 00 du matin, il me fera tourner en bourrique ! Un stress géant me révèle que je ne suis rien au regard des forces mises en œuvre par dame nature… Enfin les éléments s’apaisent, j’arrive enfin à tomber dans les bras de Morphée… Au matin j’irais saluer 2 allemands installés vers la baie du petit pont, il m’offriront un café, et dans nos anglais approximatifs, nous échangeront sur nos émotions de la nuit ! Brrrr…

      Voilà brossé un petit tableau, une petite biographie, d’un pêcheur de carpe sur le retour (juin 2015) et qui, aujourd’hui, dernier jour de janvier, attend avec impatience de pouvoir lancer quelques bouillettes, et entendre sonner ses détecteurs, pour bien commencer la saison 2016…

peche-animal

 

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2 réponses

  1. Alexandre masson dit :

    Excellent bravo le sang la sueur la volonté bref notre passion

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